Histoire
En 1942, en pleine Seconde Guerre mondiale, les gouvernements des pays européens en guerre contre l’Allemagne nazie et ses alliés se réunissent à Londres, alors encore sous les bombardements, à l’occasion de la Conférence des ministres alliés de l’éducation. La guerre est encore loin d’être terminée, mais ces pays commencent déjà à réfléchir à la reconstruction des systèmes éducatifs une fois la paix revenue. Cette Conférence des ministres alliés de l’éducation marque le point de départ d’un projet de coopération internationale dans le domaine de l’éducation, bientôt élargi à la science, la culture et l’information.
Cette dynamique s’inscrit dans la continuité d’initiatives internationales plus anciennes, en particulier celle de l’Institut international de coopération intellectuelle, créé en 1925 sous l’égide de la Société des Nations. Cet institut basé à Paris visait déjà à renforcer les échanges entre intellectuels, scientifiques et éducateurs. Il est aujourd’hui considéré comme le principal précurseur de l’UNESCO.
C’est dans cet esprit qu’en novembre 1945, des représentants de 44 gouvernements se réunissent à Londres pour jeter les bases d’une nouvelle organisation intergouvernementale. 37 États signent alors la Constitution de l’UNESCO, affirmant leur engagement en faveur de la paix par la coopération intellectuelle. L’Organisation devient officiellement active en 1946, à l’entrée en vigueur de sa Constitution, après ratification par 20 États.
«Nombreux sont parmi nous ceux qui ont bu ensemble au calice de la douleur et du sacrifice. Aujourd’hui, éducateurs, chercheurs, tous ceux qui travaillent dans le domaine de la culture, nous représentons ici ceux qui enseignent, ceux qui découvrent, ceux qui écrivent et ceux dont l’inspiration s’exprime dans la musique ou dans l’art. Notre tâche est immense, car ce qu’on nous demande, c’est de mettre sur pied l’un des éléments — et non des moindres — de cette Organisation des Nations Unies en qui nous plaçons tous nos espoirs pour l’avenir de l’humanité. Il nous appartient d’ouvrir les voies par lesquelles pourront passer, de peuple à peuple, les grands courants de la connaissance et de la pensée, de la vérité et de la beauté, qui forment l’essence même de toute civilisation digne de ce nom.»
Ellen Wilkinson, Présidente de la Conférence et Ministre de l’Éducation du Royaume-Uni
Londres, le 1er novembre 1945
La première Conférence générale de l’UNESCO se tient à Paris du 19 novembre au 10 décembre 1946, dans le Grand Amphithéâtre de la Sorbonne. À cette occasion, Paris est confirmée comme siège permanent, et Julian Huxley est nommé premier Directeur général. La Suisse, de son côté, rejoint relativement tôt la nouvelle organisation, en devenant membre de l’UNESCO dès 1949.
Une Organisation façonnée par l’histoire
Les divisions politiques issues de la Seconde Guerre mondiale ont fortement influencé la composition initiale de l’UNESCO. Le Japon et la République fédérale d’Allemagne n’y adhèrent qu’en 1951, suivis de l’Espagne en 1953.
Au fil des décennies, l’évolution géopolitique mondiale a eu des répercussions directes sur l’adhésion des États membres. L’Union soviétique, absente à la fondation, devient membre en 1954. Elle est remplacée en 1992, à la suite de sa dissolution, par la Fédération de Russie ainsi que douze anciennes républiques soviétiques, devenues indépendantes. Dans le contexte du processus de décolonisation, une vague importante d’adhésions se produit dans les années 1960 : dix-neuf États africains nouvellement indépendants rejoignent l’UNESCO, marquant une phase d’universalisation de l’Organisation.
En 1971, la République populaire de Chine devient le seul représentant légitime de la Chine à l’UNESCO. La République démocratique allemande adhère en 1972 avant de disparaître à la suite de la réunification allemande en 1990.
L’histoire de l’UNESCO a également été ponctuée de retraits temporaires liés à des différends politiques ou budgétaires. Plusieurs États se sont retirés pour une période prolongée avant de revenir au sein de l’Organisation. L’Afrique du Sud, en raison de sa politique d’apartheid, a quitté l’UNESCO en 1957 et n’y est revenue qu’en 1994, après l’avènement de la démocratie. Les États-Unis se sont retirés une première fois en 1985, puis sont revenus en 2003. Ils se sont toutefois retirés à nouveau en 2018, avant de réintégrer officiellement l’UNESCO en 2023. Israël s’est également retiré de l’Organisation en 2018, à la suite des États-Unis, et n’a pas encore réintégré l’UNESCO à ce jour. Le Royaume-Uni s’est également retiré en 1986 et a fait son retour en 1997. Enfin, Singapour, également parti en 1986, est redevenu membre en 2007.
Ces évolutions témoignent du rôle de l’UNESCO comme espace multilatéral traversé par les tensions, les transformations et les réalignements du monde contemporain, mais aussi de sa capacité à maintenir un dialogue ouvert et à intégrer de nouveaux membres dans un cadre universel.

Quelques dates clefs
2017: La Conférence générale élit Audrey Azoulay (France) onzième Directrice générale de l’UNESCO.
2015: L’UNESCO adopte le Cadre d’action Éducation 2030, en appui à l’Objectif de développement durable n°4, visant une éducation inclusive et de qualité pour tous.
2011: La Palestine devient membre à part entière de l’UNESCO, entraînant la suspension des contributions financières de certains États, dont les États-Unis.
2009: La Conférence générale élit Irina Bokova (Bulgarie) dixième Directrice générale de l’UNESCO. Elle est la première femme à exercer cette fonction depuis la création de l’Organisation en 1945.
2003 : Adoption de la Convention pour la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel, marquant une reconnaissance globale des traditions vivantes et du savoir-faire des communautés.
2001: La Déclaration universelle sur la Diversité culturelle de l’UNESCO est adoptée par la Conférence générale.
1998: L’Assemblée générale des Nations Unies fait sienne la Déclaration universelle sur le génome humain et les droits de l’homme, développée et adoptée par l’UNESCO en 1997
1992: Création du programme Mémoire du Monde pour protéger les trésors irremplaçables des bibliothèques et les collections d’archives. Il comporte aujourd’hui également des archives sonores, cinématographiques et télévisuelles.
1990: La Conférence mondiale sur l’Éducation pour tous, qui se tient à Jomtiem, Thaïlande, lance un mouvement mondial pour fournir une éducation de base à tous les enfants, jeunes et adultes. Dix ans plus tard, à Dakar (Sénégal), le Forum mondial sur l’Éducation engage les États à achever l’éducation de base pour tous en 2015.
1978: L’UNESCO adopte la Déclaration sur la race et les préjugés raciaux. Des rapports publiés par la suite sur le sujet par le Directeur général ont servi à discréditer et à réfuter les bases pseudo-scientifiques du racisme.
1975: L’Université des Nations Unies est créée à Tokyo, sous les auspices des Nations Unies et de l’UNESCO.
1974: S.S. le Pape Paul VI remet le Prix Jean XXIII pour la Paix à l’UNESCO.
1972: Adoption de la Convention concernant la Protection du Patrimoine culturel et naturel mondial. Ce texte fondateur établit les bases de la protection du patrimoine culturel et naturel commun à toute l’humanité. Le Comité du patrimoine mondial est créé en 1976 et les premiers sites sont inscrits sur la Liste du patrimoine mondial en 1978.
1970: Adoption de la Convention sur les biens culturels volés ou illicitement exportés, visant à lutter contre le trafic illégal d’objets culturels.
1969: Le Bureau international d’éducation (BIE), fondé en 1925 à Genève et longtemps dirigé par Jean Piaget, devient un institut de catégorie I de l’UNESCO, pleinement intégré à l’Organisation.
1968: L’UNESCO organise la première conférence intergouvernementale visant à réconcilier l’environnement et le développement, ce qu’on appelle maintenant le «développement durable». Cela conduit à la création du Programme «L’Homme et la Biosphère» (Man and the Biosphere, MAB) de l’UNESCO.
1960: Lancement de la Campagne de Nubie en Égypte pour déplacer le Grand Temple d’Abou Simbel et éviter son inondation par le Nil lors de la construction du barrage d’Assouan. Pendant cette campagne, qui a duré 20 ans, 22 monuments et éléments architecturaux ont été déplacés. Ce fut la première et la plus importante d’une série de campagnes parmi lesquelles celles de Mohenjo Daro (Pakistan), de Fès (Maroc), de Kathmandou (Népal), de Borobudur (Indonésie) et de l’Acropole d’Athènes (Grèce).
1958: Inauguration du siège actuel de l’UNESCO à Paris, surnommé « La Maison de l’UNESCO », situé Place de Fontenoy. Conçu par les architectes Marcel Breuer, Pier Luigi Nervi et Bernard Zehrfuss, le projet a été supervisé par un comité international présidé par le Suisse Le Corbusier.
1954: Fondation du CERN à l’initiative de l’UNESCO, après des travaux préparatoires lancés en 1950. L’organisation, dont le siège est établi à Genève, devient juridiquement indépendante de l’UNESCO dès l’entrée en vigueur de sa Convention, signée par 12 États européens.
1952: Une conférence intergouvernementale réunie par l’UNESCO adopte la Convention universelle sur le droit d’auteur. Dans les décennies qui ont suivi la seconde guerre mondiale, la Convention a servi à étendre la protection du droit d’auteur à de nombreux États qui n’étaient pas parties à la Convention de Berne pour la protection des œuvres littéraires et artistiques (1886).
1946: Première Conférence générale de l’UNESCO, dans le Grand Amphithéâtre de la Sorbonne. À cette occasion, les représentants des 44 États fondateurs confirment la nomination du britannique Julian Huxley comme premier Directeur général et actent le choix de Paris comme siège permanent. La Constitution de l’UNESCO entre en vigueur.
1945: Adoption de la Constitution de l’UNESCO à Londres.